Trois ans se sont écoulés. Les enfants ont grandi, les parents se sont assagis (ou presque) et Mamie Aurore revient en force !
Trois ans plus tard, c’est un plaisir immense et non dissimulé de retrouver le réalisateur Gabriel Julien-Laferrière, accompagné de Julie Gayet, Claudia Tagbo et Chantal Ladesou pour parler de ce second volet et du magnifique premier rôle qu’il offre à cette grande dame qui nous plaît beaucoup – et ce n’est pas qu’une impression…
Vous terminez ce soir, à Saint-Jean-de-Luz, une longue tournée de promotion où vous avez enchaîné les succès auprès du public.
Gabriel Julien-Laferrière. C’est très émouvant de voir des salles pleines, et surtout la réaction du public. Les gens viennent en famille et tout le monde est heureux ensemble, de la grand-mère au gamin qui partagent le même sourire. Cela fait plaisir de voir qu’on a fait un film fédérateur.
Chantal Ladesou. De l’appareil dentaire à la hanche en titane !
Qu’est-ce qui a motivé l’écriture de cette suite ? Le succès de C’est quoi cette famille ?! ou l’envie de reformer cette famille disparate et attachante ?
GJL. Le succès avait été raisonnable. C’est vrai que j’avais envie de retrouver la troupe que j’avais formée, et ce travail de groupe. Et il y a eu surtout cette motivation collective des acteurs, qui se sont réjouis quand ils ont découvert le rôle écrit pour Chantal.
Julie Gayet. On en rêvait, on était tous derrière. Elle a enfin un grand rôle à elle ! Je ne comprends pas : qu’est-ce que fout le cinéma français ?
Le film repose en effet sur le personnage de la grand-mère…
GJL. Et sur Chantal. Enfin un film qui lui donne un rôle de premier plan !
CL. Enfin ! Il était temps ! (Rires.) C’est un joli rôle que Gaby m’a offert, très bien écrit, et à tiroirs, avec les moyens de faire évoluer le personnage. Dans le premier volet, le personnage était linéaire, uniquement dans le rejet de ses petits-enfants. Ici, c’est un personnage à la fois cash et tendre, qui offre plusieurs nuances à jouer.
Vous êtes intervenue dans l’écriture de votre texte ?
CL. Non, parce que le rôle était bien écrit, Gaby est très précis dans ce qu’il écrit. J’ai fait quelques propositions de jeu à l’intérieur des dialogues. Il est client, et comme il est très rieur, on sait tout de suite si ça marche ou pas.
GJL. Je pars du principe que les acteurs comme les techniciens, par leur créativité, peuvent rendre mon film meilleur. Surtout dans la comédie, où l’idée est qu’ils s’amusent en jouant.
La grand-mère, aussi déjantée soit-elle, reste le socle de la famille et un refuge pour les petits-enfants.
GJL. Quand le cocon familial se casse, les grands-parents deviennent le centre. Ils ont la même puissance d’amour que les parents, mais avec un regard décalé qui donne un autre relief au monde et qui aide à faire son chemin.
CL. Mamie Aurore est une femme libre, qui veut apprendre la liberté à ses petits-enfants. Elle voit les choses et elle met le doigt sur ce que les parents n’ont pas vu ou n’acceptent pas. Cela les énerve d’ailleurs un peu que la grand-mère voie les choses comme ça. Mais même si elle continue sa route, elle fédère toute la famille.
GJL. Elle donne notamment la bonne perspective au personnage de Claudia en lui montrant et lui faisant accepter son enfant tel qu’il est. C’est par le regard de l’autre qu’on prend conscience de choses que l’on n’avait pas vues.
L’apprentissage de la liberté s’illustre par le saut d’une falaise, tout à fait impressionnant. Vous avez réellement réalisé la cascade ?
JG. Oui, on a suivi un entraînement, en sautant de différentes hauteurs avec un type absolument génial.
GJL. Loulou…
CL. Loulou, de la falaise ! Enfin… c’est pas Loulou de la Falaise ! (Rires.)
GJL. C’est Lionel Franc, champion du monde de saut de tête. Il fait des plongeons dans les calanques de Cassis, son record est à 36 mètres. C’est une tradition qui vient des dockers qui sautaient des grues dans les ports et c’est devenu une discipline. Il a bien expliqué aux acteurs les positions à respecter et l’échauffement. Ce qui m’inquiétait le plus, c’était de sauter à plusieurs ; il a donc beaucoup travaillé là-dessus.
C’est en sautant que vous vous êtes blessée à la cheville ?
CL. Je me suis fait une entorse en marchant dans le sable avec des talons hauts, le premier jour du tournage ! Je ne pouvais pas poser le pied par terre… En fait, il ne faut pas m’engager parce que je peux bousiller un tournage en 5 secondes !
GJL. Oui, j’ai dû revoir un peu mes plans… le jour même !
Les enfants sont devenus des adolescents, ce qui ouvrait le champ aux thèmes qui touchent cet âge. Vous évoquez l’homosexualité…
GJL. Je ne me sens pas militant, mais c’est un sujet qui concerne beaucoup de parents, et je suis heureux de pouvoir l’évoquer dans une comédie familiale.
Vous donnez également un petit coup de canif aux générations précédentes « qui ont bousillé la planète »…
GBJ. C’est plutôt une plaisanterie, dans la mesure où en réalité les enfants bouffent n’importe quoi ! J’ai surtout voulu souligner que les gamins d’aujourd’hui manquent d’insouciance et que la génération de Mamie Aurore était exclusivement insouciante. C’est ce contraste-là qui m’intéressait. Le langage aussi dénote un certain côté rigide dans la génération qui arrive.
À moi vous pouvez bien le dire : à la suite de ce tournage, où vous incarnez une fêtarde invétérée qui passe ses soirées à fumer et à boire, êtes-vous tombée dans l’alcool ?
CL. Absolument. Dans l’alcool et dans la drogue !
Claudia Tagbo. C’est simple, elle fonctionne à la drogue… et aux sardines !
CL. J’ai été intronisée durant la tournée, à Saint-Gilles-Croix-de-Vie, Grand sardinier de la sardine.
JG. Dans le coffre, on a 250 boîtes de sardines !
On sentait un réel plaisir et une jubilation du groupe à se retrouver. Est-ce qu’on a un chagrin immense quand le tournage se termine ?
CT. On peut sentir un petit vide, mais on a la satisfaction de se dire que le film reste.
GJL. Contrairement au premier volet, ce tournage a été découpé, donc on a eu moins de moments où nous étions tous réunis. En revanche, la tournée est un moment intense parce qu’on passe beaucoup de temps ensemble.
CT. Chantal est sur la route depuis le 30 juin. Elle est costaud, la dame !
CL. J’ai plus rien de propre à me mettre ! Non, pas de chagrin, parce qu’on sait qu’on va faire le 3 ! Et puis au bout d’un moment, on en a marre de voir les mêmes têtes tout le temps ! (Rires.)
JG. Le truc, c’est que ça va tellement cartonner que tout le monde va vouloir te faire tourner et qu’on ne pourra plus travailler avec toi !
CT. Ceux qui n’ont pas pu travailler avec Chantal avant, là c’est mort !